S’installer en zone rurale en tant que médecin généraliste est une aventure qui attire de plus en plus de professionnels en quête de sens et d’un meilleur équilibre de vie. Aude et Jacques font partie de ces praticiens qui ont quitté les grandes villes pour exercer autrement. C’est en choisissant de soigner en Creuse, sur le Plateau de Millevaches, qu’ils ont trouvé non seulement un cadre de travail stimulant et innovant, mais aussi un territoire où leur engagement médical prend tout son sens. Retour sur leur parcours, leurs motivations et leur quotidien !
Deux médecins, un nouveau souffle sur le Plateau de Millevaches
Le parcours riche et une quête de sens pour Aude
Aude et Jacques ne sont pas arrivés sur le Plateau de Millevaches par hasard. Tous deux médecins, ils ont suivi des chemins bien différents avant de faire le choix engagé de venir soigner en Creuse. À 38 ans, Aude exerce ici depuis cinq ans. Son parcours, jalonné d’expériences variées, lui a permis d’explorer plusieurs façons de pratiquer son métier… et de comprendre celles qui ne lui convenaient pas. L’exercice en ville, lui offrait un certain confort : tout à portée de main, une vie citadine dynamique. Pourtant, quelque chose clochait. « J’appréciais vraiment l’accessibilité et les services, mais je n’étais pas complètement satisfaite », confie-t-elle. Peu à peu, des préoccupations écologiques et sociales l’ont amenée à remettre en question son cadre de vie urbain. Le Plateau de Millevaches a tout changé. Ce n’est pas seulement le cadre naturel qui l’a séduite, mais aussi la dynamique collective qui s’en dégageait. « J’ai découvert beaucoup d’innovations et je me suis reconnue dans les valeurs de justice sociale et de coopération entre professionnels. Ça m’a beaucoup plu et c’est ce qui m’a décidée à m’installer six mois après. »
Et puis, il y a eu ce sentiment d’ailleurs, cette impression de voyage sans quitter la France : « L’année précédente, j’avais passé un an en Nouvelle-Zélande, et en arrivant ici, je me suis dit qu’il n’y avait pas besoin d’aller à 15 000 km pour être dépaysée. »
De Paris aux grands espaces : le déclic de Jacques
Jacques a grandi près de Troyes avant d’entamer des études de médecine à Reims, puis un internat à Paris. Un changement radical qu’il accueille avec enthousiasme. « À 25 ans, j’étais ravi d’arriver à Paris, mais à 35 ans, tout aussi heureux d’en partir. »
Après plusieurs remplacements, il ouvre son cabinet à Stalingrad. Il aime ses patients, mais l’effervescence de la ville finit par l’épuiser. « Le bruit est permanent. Un matin, en allant travailler, j’ai crevé à vélo. J’ai voulu prendre le métro, mais j’ai eu un blocage. Impossible d’y entrer. Saturation. J’ai fini par marcher jusqu’au cabinet, avec une heure de retard. Ce jour-là, j’ai compris qu’il fallait que je parte. »
C’est finalement son amour du vélo qui va tracer la suite. Lors d’un de ses périples à travers la France, il découvre le Plateau de Millevaches. Le coup de cœur est immédiat. Deux ans plus tard, il y retourne avec un ami et, par hasard, croise Aude, médecin comme lui, dans la commune de Bugeat où elle exerce. Le territoire et cette rencontre achèvent de le convaincre : ici, une autre façon d’exercer la médecine et de vivre s’impose comme une évidence.

VTT dans la Carrière de Guéret
© Foehn Photographie
Soigner en Creuse, un quotidien professionnel enrichissant
Un travail d’équipe et une approche innovante
Aude et Jacques exercent au sein de MilleSoins, un réseau de santé multisites qui couvre le sud de la Creuse et le nord de la Corrèze. Ce réseau coordonne une équipe pluridisciplinaire répartie sur plusieurs communes du Plateau de Millevaches : Bugeat, Faux-La-Montagne, Peyrelevade, Royères-de-Vassivière et Sornac.
Si l’exercice en milieu rural peut parfois être perçu comme un défi, il pousse ici à sans cesse repenser les pratiques. Les contraintes forgent l’innovation est une maxime que l’équipe applique au quotidien ! Aude explique : « on n’est pas du tout dans le cliché de la campagne qu’on pourrait avoir lorsqu’on vient de la ville. Ici, on cherche toujours à faire mieux et à adapter la médecine aux besoins du territoire. »
Un rythme de travail plus humain
Aude apprécie la liberté que lui offre le soin en Creuse. « On sait que le métier de médecin généraliste n’est pas le même en ville qu’à la campagne. » Contrairement aux cabinets urbains où les consultations s’enchaînent à un rythme effréné, elle voit en moyenne 20 à 25 patients par jour, contre 40 en ville. Un choix assumé : « On ne peut pas enchaîner les patients si l’on veut bien faire notre travail. On est souvent à la fois assistant social, psychologue, cardiologue, pédiatre, gynécologue…»
Jacques, lui, a été surpris par l’organisation des soins sur le territoire. « En arrivant à la campagne, je pensais vraiment que le système de santé serait bien plus dysfonctionnel qu’à Paris. Mais le service des urgences du Centre hospitalier de Haute-Corrèze à Ussel fonctionne bien mieux que celui de Lariboisière à Paris. Certes, l’hospitalisation est plus compliquée, mais ce n’est pas un problème propre au territoire, c’est une question de système de santé en général. »
Si l’accès aux spécialistes peut être un enjeu en zone rurale, l’organisation locale permet de compenser ces difficultés. « Ici, comme les équipes sont plus petites et les hôpitaux plus accessibles, nous avons des relations privilégiées avec les spécialistes et les paramédicaux. Obtenir un avis médical est plus simple, même si les délais de rendez-vous restent longs. »

©CD23
Soigner en Creuse : une médecine plus variée et plus technique
Aude apprécie la diversité des cas qu’elle rencontre. « Les actes sont plus variés qu’en ville. Ça met du challenge mais on apprend en permanence et ça rend notre exercice vraiment diversifié. »
Jacques insiste sur l’image erronée du médecin généraliste. « Beaucoup de gens pensent qu’un généraliste se contente de soigner des rhumes, de renouveler des prescriptions ou de faire des certificats pour le sport. Mais c’est une vision complètement faussée. Ces consultations représentent à peine 10% de notre activité. »
En faisant le choix de soigner en Creuse, ils sont amenés à réaliser des soins que peu de généralistes en ville pratiquent encore. « Ici, on ne sait jamais à quoi s’attendre. Un jour, je peux examiner un agriculteur qui s’est mis de la limaille dans l’œil et devoir faire un examen ophtalmologique, et le lendemain, gérer un accident impliquant un animal. » détaille Aude. Jacques renchérit : « À Paris, en trois ans, j’ai dû faire trois sutures. À la campagne, c’est complètement normal d’en faire régulièrement en cabinet. »
Un quotidien personnel plus apaisé et épanouissant
Un nouveau rythme de vie, plus serein
S’installer sur le Plateau de Millevaches a bouleversé la manière dont Aude et Jacques envisagent leur quotidien. « En venant ici, j’ai appris à être beaucoup plus patiente. Je ne suis plus dans l’urgence de vouloir tout, tout de suite. Aujourd’hui, je relativise beaucoup plus », confie Aude.
Un sentiment partagé par Jacques, qui mesure à quel point sa qualité de vie s’est améliorée. « Les relations avec les autres sont tellement plus simples ici. D’ailleurs, ma vie sociale est bien plus riche aujourd’hui qu’à Paris. Ici, tout est plus spontané et naturel. On se prend moins au sérieux. »

Randonnée au Lac de Vassivère
© J. Damase
Un mode de vie plus en phase avec leurs envies et leurs valeurs
En plus de leur travail, chacun cultive des passions facilitées par leur nouvel environnement. « Je fais beaucoup de sport. Ici, je peux faire du vélo autant que je veux, c’est un vrai bonheur comparé à Paris. J’ai aussi un potager dont j’adore m’occuper », raconte Jacques.
Il souligne aussi une petite adaptation nécessaire : « Je suis végétarien et, au début, je pensais que ce serait compliqué ici. C’est vrai qu’on est dans une région où la viande a une place importante et il peut y avoir une certaine incompréhension au départ. Mais finalement, ça passe vite, et je trouve tout ce dont j’ai besoin, notamment dans les magasins en vrac. »
Aude, elle, apprécie le contraste entre sa vie rurale et des échappées urbaines ponctuelles. « J’aime beaucoup m’accorder une journée off en ville. J’en profite pour faire mes courses, aller dans un salon de thé… J’ai un vrai plaisir à redécouvrir la ville, comme Limoges, mais j’apprécie encore plus de rentrer chez moi ensuite. »
Au-delà du cadre de vie en Creuse, leur installation sur le Plateau de Millevaches fait aussi écho à leurs valeurs. « On est sur un territoire assez engagé d’un point de vue écologique. Ça a du sens pour nous d’être installés ici, dans un endroit qui réfléchit aux questions de justice sociale, de démocratie et d’ouverture. C’est une terre de résistance et ce n’est pas anodin. »

Journée de la Laine, Felletin
© J. Damase
S’intégrer : aller vers les autres et participer à la vie locale
S’ils reconnaissent que leur métier de médecin a facilité leur intégration, Aude et Jacques insistent sur l’importance d’aller vers les autres. « Ici, il faut oser s’impliquer dans la vie du village. Les associations sont un excellent moyen de rencontrer du monde. »
Pour ceux qui souhaiteraient venir soigner en Creuse, Aude et Jacques recommandent de s’intéresser aux communes les plus actives comme Felletin, tant sur le plan culturel qu’économique et social. Si vous recherchez un cadre plus paisible, les petits villages du territoire permettent de profiter pleinement du charme du Plateau de Millevaches, tout en restant connectés à la vie locale. Prendre le temps d’explorer le département est essentiel : à pied, à vélo ou en voiture, le plateau dévoile des paysages exceptionnels, entre prairies vallonnées, forêts profondes et cours d’eau aux allures sauvages.
Enfin, Aude et Jacques insistent sur un point essentiel pour tout médecin souhaitant franchir le pas et exercer en Creuse : l’intégration est un échange et non un dû. « Il ne faut pas s’attendre à un tapis rouge. Ce n’est pas parce qu’on arrive à la campagne qu’on doit se voir comme un messie. Bien sûr, les médecins sont attendus, mais il faut rester humble et comprendre que chacun, ici, participe à sa façon à la vie du territoire. L’essentiel est de s’intégrer avec respect et envie. » Un message clair si, comme eux, vous recherchez un nouveau cadre de vie en phase avec vos aspirations, sans renier l’importance du collectif et de la vie locale.
Leur témoignage vous a convaincu ? Alors jetez un oeil sans attendre aux opportunités qui vous attendent si vous faites le choix de venir soigner en Creuse ! Pour continuer à vous laisser inspirer, l’histoire d’Antonin et Caroline vous offrira un autre récit d’un changement de vie engagé et réussi !
Photo principale : Médecin en Creuse ©CD23
Dossier réalis en partenariat avec le Département de la Creuse
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